SOS MEDITERRANEE exhorte les dirigeants de l’UE à garantir des ports de débarquement sûrs pour les personnes secourues en mer

Marseille, Berlin, Palerme, Genève, le 23 juin 2018

Le 17 juin à Valence, SOS MEDITERRANEE a lancé – au terme de l’odyssée forcée, dangereuse et dégradante de son navire de sauvetage, l’Aquarius – un appel urgent aux États membres de l’Union Européenne (UE) pour qu’ils définissent sans attendre un modèle européen de recherche et sauvetage en mer, fondé sur la priorité absolue et unique de sauver des vies.

Alors que l’Aquarius fait de nouveau route vers la zone de recherche et sauvetage en Méditerranée centrale, SOS MEDITERRANEE s’interroge : ce cri d’alarme, porté par d’innombrables voix et par une grande mobilisation de citoyens européens ne pouvant accepter de porter plus de morts sur leur conscience, a-t-il été entendu ?

SOS MEDITERRANEE rappelle que c’est l’échec de l’UE à réduire le nombre de morts en Méditerranée qui a forcé les organisations humanitaires à intervenir et à entreprendre leurs activités de recherche et de sauvetage dans le but d’éviter de nouvelles pertes de vies humaines.

Nous saluons l’intention annoncée du Conseil européen des 28 et 29 juin prochains de se pencher sur cette question. Nous saluons également le fait qu’une réunion préparatoire informelle, devant avoir lieu ce dimanche 24 juin à Bruxelles, ait été convoquée par le président de la Commission européenne.

Reconnaissant à la fois les immenses efforts déployés par l’Italie, seule, pour accueillir des rescapés dans ses ports pendant des années et les ressources exceptionnelles déployées par l’Espagne pour le récent débarquement de l’Aquarius à Valence, SOS MEDITERRANEE accueillerait favorablement tout plan qui prévoirait à l’échelle européenne la mobilisation de toutes les ressources disponibles pour assurer le débarquement sûr et rapide des personnes secourues en Méditerranée centrale.

Cependant, le modèle européen de recherche et sauvetage, tel que celui réclamé par SOS MEDITERRANEE, exige que les États membres de l’UE garantissent le respect de toutes les conventions internationales humanitaires et maritimes et la possibilité pour les capitaines de navire d’agir en pleine conformité avec les réglementations définies par l’Organisation Maritime Internationale.

Selon ces conventions, les personnes secourues en mer doivent être débarquées dans un port sûr, où leurs besoins fondamentaux, y compris leurs besoins médicaux spécifiques, puissent être assurés, et où elles puissent obtenir la protection à laquelle elles ont droit. Elles doivent notamment être protégées contre toute forme d’abus, d’exploitation et de trafic.

Lorsque l’Union Européenne évaluera l’introduction de nouveaux instruments au cours du Conseil européen la semaine prochaine, elle devra placer l’impératif de préservation et de protection de la vie des personnes en détresse avant toute autre considération politique.

Faut-il rappeler à l’Union Européenne qu’elle s’est engagée déjà depuis des mois sur une voie dangereuse avec son programme de financement et de formation des garde-côtes libyens qui interceptent en mer des personnes fuyant les mauvais traitements et de graves violations des droits de l’Homme ? Cela n’a eu pour conséquence que d’entraîner des sauvetages retardés, mal coordonnés, entravés ou chaotiques et d’accroître les risques d’une traversée déjà extrêmement périlleuse, ainsi que le nombre de morts, les personnes en détresse prenant plus de risques que jamais pour tenter de fuir. Cela a également eu pour conséquence le renvoi de milliers de personnes vers «l’enfer libyen» qu’elles tentaient désespérément de fuir. Non seulement cette approche va à l’encontre du droit international et des valeurs humanitaires sur lesquelles l’Union Européenne se fonde, mais elle a surtout échoué et doit cesser immédiatement.

Alors que l’Aquarius atteindra dans quelques heures la zone de recherche et de sauvetage dans les eaux internationales au large de la Libye, une solution concrète, garantissant la sécurité et la protection des hommes, des femmes et des enfants secourus en mer, doit être trouvée d’urgence.

En l’absence d’informations confirmées, de précisions géographiques, de calendrier ou d’examen indépendant sur la possibilité pour des « plateformes de l’UE »  d’offrir de telles garanties de sécurité et de protection, SOS MEDITERRANEE et les citoyens européens exhortent les États membres de l’Union Européenne à prendre immédiatement leurs responsabilités et à fournir une solution partagée, pragmatique et réaliste. Cette solution doit prendre en compte les ports maltais et siciliens, qui, à proximité directe de la zone de recherche et sauvetage, ont jusqu’à présent toujours été considérés comme sûrs.

Montage vidéo : Julien Lombard