Premier sauvetage en mer de 2017: 114 rescapés d’un bateau pneumatique
3 janvier 2017

  “SARcase001« : voici le nom officiel qu’a donné le Centre de Coordination des Secours de Rome (MRCC) au sauvetage en mer effectué à 4 heures ce matin face à la Libye. Il signifie « Opération de Recherche et Sauvetage numéro 1 ». De fait, il s’agit bien de la première opération de sauvetage au large des côtes libyennes de la nouvelle année 2017 – force est de constater que la tragédie perdure.

      C’est vers 3h45 ce matin que l’ équipage de l’Aquarius a repéré le bateau pneumatique sur le radar. A peine quelques minutes et l’on frappe à ma porte, puis le téléphone se met à sonner. C’est Yohann, le coordinateur des secours:

“Il est 4 heures, bonjour René. Il y a un bateau pneumatique en vue. »

       Comme à chaque fois, il ne faut que quelques minutes à notre équipe de Recherche et Sauvetage composée de 11 femmes et hommes pour être fin prête, équipée de pied en cap, avec gilet de sauvetage et casque. A 4h20, le premier canot de sauvetage est à l’eau.

      « Le canot pneumatique semble être en bon état mais nous allons envoyer notre petit canot numéro 2 évaluer la situation dès maintenant », annonce Nicola, la coordinatrice adjointe.

    Quelques instants plus tard, Simon nous lance un appel radio du canot numéro 2: “ Il y a des femmes à bord. Un jeune enfant aussi. Surtout des hommes. Ils parlent français. il n’y a pas d’eau dans le bateau et tout le monde est calme pour le moment.”

     Il faudra encore 20 minutes pour distribuer des gilets de sauvetage à tout le monde sur ce bateau pneumatique surchargé. La première navette emmène les femmes, le jeune enfant et quelques hommes jusqu’à l’Aquarius. Notre équipe à bord attend les rescapés, que nous accueillons et aidons à se débarrasser de leur gilet de sauvetage. Les femmes sont accompagnées au lieu d’ accueil qui leur est réservé à l’intérieur du navire, alors que les hommes doivent rester sur le pont arrière.

      Dès leur arrivée sur l’Aquarius, tous les passagers sont enregistrés. Notre partenaire, Médecins Sans Frontières, effectue très rapidement cette opération. Nous apprenons ainsi l’âge et le pays d’origine de chacun. En outre, nous nous faisons une première idée de ceux qui sont mineurs, voire mineurs isolés.  Il nous est utile de le savoir pour assurer à ces personnes vulnérables une meilleure protection, à bord dans un premier temps, mais également plus tard, quand nous les débarquerons.

       Les premiers hommes arrivés sont sur le pont arrière. Déjà libérés, ils sourient et chantent sur le champ, en clamant: “Merci! Merci! Merci!” La plupart sont originaires du Sénégal et de la Guinée Conakry, mais ils viennent aussi d’Ouganda, du Mali et de la Côte d’Ivoire. En général, ils parlent français.

       Une heure après, les 114 rescapés ont tous été évacués et se trouvent sains et saufs à bord de l’Aquarius. Il est alors 5h30 et l’ équipe de sauvetage note certaines informations à propos de l’ opération: la date, l’ heure et le lieu du sauvetage. Nous rendons inutilisable le bateau pneumatique affinons notre analyse de la qualité du matériau utilisé pour fabriquer ces bateaux.

       Alors que l’Aquarius termine cette première opération de l’ année 2017, nos collègues du navire de secours « Golfo Azzurro », affrété par l’organisation « Pro Activa Open Arms », recherchent un autre bateau pneumatique en détresse.

      “Les rescapés nous ont indiqué qu’ils avaient embarqué cette nuit vers minuit. Ils ont donc passé 4 heures en mer. Mais ils nous ont aussi raconté qu’une autre embarcation du même type avait quitté la côte libyenne, » rapporte Aali, le médiateur culturel chargé de converser avec nos nouveaux passagers.

       L’Aquarius reste basé sur la zone ouest de sauvetage pour surveiller la mer. Les conditions météorologiques sont bonnes, les vagues faibles et la brise légère. Il se pourrait bien que de nouveaux bateaux tentent un départ des côtes libyennes.  Pour l’Aquarius, la nouvelle année débute comme la précédente s’est terminée: nous demeurons au poste pour sauver des vies en mer Méditerranée.

Crédits photos : Kevin Mcelvaney